Galien

    De Wiki Maria Valtorta

    En EMV 129.2, Jésus cite des sentences attribuées à un écrivain romain Galien (Galeno en italien). Mais Claude Galien (Claudius Galienus) ne vécut que plus tard, de l’an 129 à l’an 216. C’était un médecin célèbre qui écrivit des ouvrages monumentaux sur des sujets médicaux mais aussi des réflexions philosophiques. Il s’agirait donc d’un anachronisme. Une erreur aussi grossière est pourtant contradictoire avec la précision et la pertinence habituelle des données historiques de Maria Valtorta.

    Anachronisme ou énigme ?

    De mai 1979 à février 1980, La Chiesa viva, un mensuel catholique de Brescia (Lombardie) publie une série de critiques sur l’œuvre de Maria Valtorta destinées à justifier, selon lui, sa condamnation par le Saint-Office. L'objection de Galien y figure depuis ce temps sans que personne ne puisse apporter une contradiction crédible.

    En 2014, enquêtant sur cette question, Jean-François Lavère a trouvé la trace de ces citations dans Le génie du christianisme[1] de François René de Chateaubriand (1768-1848) :
    Ô toi qui nous a faits ! en composant un discours si saint je crois chanter un véritable hymne à ta gloire ! Je t’honore plus en découvrant la beauté de tes ouvrages qu’en te sacrifiant des hécatombes entières de taureaux ou en faisant fumer tes temples de l’encens le plus précieux. La véritable piété consiste à me connaître moi-même, ensuite à enseigner aux autres quelle est la grandeur de ta bonté, de ton pouvoir, de ta sagesse. Ta bonté se montre dans l’égale distribution de tes présents, ayant réparti à chaque homme les organes qui lui sont nécessaires ; ta sagesse se voit dans l’excellence de tes dons, et ta puissance dans l’exécution de tes desseins [Galien, De Usu partium corporis humani (De l'utilité des parties du corps humain), livre III, chapitre 10].
    En une seule citation, F.R. de Chateaubriand regroupe les citations données par Jésus dans Maria Valtorta. À défaut d’être identiques, elles sont largement similaires. Il échangea ses conclusions avec des universitaires italiens, dont Fernando La Greca, spécialisé dans l’histoire romaine. à la faculté de Salerne (Campanie). Ce dernier a publié ses conclusions dans un ouvrage paru en 2019 et traduit en français sous le titre Le monde gréco-romain à l'époque du Christ, dans l'Œuvre de Maria Valtorta[2]. Il consacre 48 pages au cas Galien. En voici des extraits :

    La question posée

    "Les citations de Galien dans l’EMV - À l’EMV 129.2, un Romain de Sybaris, qui réside à Chypre, se présente à la Belle-Eau avec son frère, qui est atteint d’un mal mystérieux. Ni les médecins qui sont disciples d’Hippocrate, ni les visites aux sanctuaires d’Esculape, dieu de la médecine, n’ont réussi à le guérir. Ayant eu vent des guérisons réalisées par Jésus, le Romain arrive en Palestine après un «terrible» voyage.

    Il demande la guérison de son frère, mais il se déclare païen. A partir de cet instant, il commence à dialoguer avec Jésus à propos de l’âme et de l’unique vrai Dieu. Cette conversation en vient étonnamment à parler du médecin Galien, qui est aussi un philosophe. Dans cet extrait-ci, nous trouvons donc un élément qui, à première vue, est un anachronisme historique évident : en effet, Galien de Pergame est connu comme un médecin grec du second siècle après Jésus-Christ. Les personnages dans le récit de L’Évangile n’auraient donc pas pu citer Galien (si on suppose que les visions de Valtorta révèlent surnaturellement des événements qui se sont passés au Ier siècle apr. J.-C. à l’époque où Jésus parcourait la Palestine).

    Cependant, il serait présomptueux de croire tout de suite que la référence à Galien mette à mal l’Œuvre valtortienne si on regarde les résultats surprenants des recherches de Jean-François Lavère, de Liberato De Caro et d’Emilio Matricciani. Mais alors, comment expliquer la présence de ce personnage? (P. 69 )"

    L'analyse des données

    Puis il développe les différentes phases de la recherche : existence de Galien et exactitude de la citation de Maria Valtorta avant de conclure :
    "En conclusion, tous les indices examinés nous permettent de postuler l’existence d’un Galien philosophe et médecin du Ier siècle apr. J.-C., si on croit les sources arabes. Galien était donc connu au temps de la prédication de Jésus et était l’auteur du De usu partium ainsi que d’autres écrits. Les œuvres de ce premier Galien auraient ensuite été intégrées à celles du Galien qui aurait vécu au temps de Marc-Aurèle, qu’il soit réel ou peut-être "reconstruit après coup" par l’école de médecine d’Alexandrie (p. 114)."
    "C’est dans cette reconstruction hypothétique d’un Galien philosophe et écrivain déjà actif avant la prédication publique de Jésus-Christ et en tout cas son contemporain, que peuvent se placer historiquement les citations littérales de Jésus dans l’EMV. Loin d’être anachroniques, ces paroles peuvent pleinement être comprises par l’érudit romain de Sybaris, intéressé par la philosophie mais aussi par la médecine (à cause des soins à prodiguer à son frère malade), qui devait être en outre un grand lecteur de livres. Le Romain peut ainsi reconnaître dans ces paroles le philosophe Galien. Par ailleurs, ces paroles ne sont pas aléatoires ; elles peuvent au contraire être tout à fait placées près des paroles qui rapprochent la culture grecque classique (platonisme et stoïcisme) à la pensée chrétienne, grâce à la vision d’un Dieu Créateur ou d’un Démiurge que donne une forme parfaite au corps humain et assigne un rôle précis à chaque partie singulière de celui-ci. Connaître et admirer une telle perfection pousse à connaître et à adorer la Vérité, c’est-à-dire le Dieu vrai, Créateur du monde (p. 116)."

    Notes et références

    1. Le génie du Christianisme, chapitre 13, L’homme physique.
    2. Fernando La Greca, Le monde gréco-romain à l'époque du Christ, dans l'Œuvre de Maria Valtorta, 225 p., éd. CEV, 2022.